On ne sauvera pas les Français. On n’en fera pas des chemises noires, ni des Chouans, et encore moins des martyrs de la Foi. Du moins, pas en utilisant des moyens politiques. Ne restent que les discussions répétées, la prière et, de temps à un autre, un trauma bien venu. Il faut acter cette réalité.
Notre peuple, le deuxième à être élu par la Providence, comme la Tradition de l’Eglise n’a cessé de l’affirmer au sujet des Francs, est monté trop haut sur l’échelle de Richter du génie artistique, militaire et chrétien pour ne pas souffrir démesurément dans sa chute. Rien ni personne, à court ni moyen terme, n’y changera quoi que ce soit. Eric Zemmour est aux Français ce qu’un geôlier laxiste est à un captif : une respiration. Faudrait-il garder la tête sous l’eau et se noyer les poumons par idéalisme ?
Clairement, il y a mieux que Zemmour : une dictature de salut public pendant dix ans, la suppression des partis politiques, la fermeture de quelques titres de presse et l’incarcération de tous les hauts-fonctionnaires, juges et autres bureaucrates qui, un jour, ont empêché une reconduction à la frontière, libéré un pédocriminel, subventionné un artiste obscène, validé un traité international rejeté par référendum ou refusé d’encourager une industrie nationale pour obéir au dogme bruxellois de la « concurrence libre et non faussée ».
En attendant, on a le Séfarade magique. Je crois peu à sa victoire, mais il faut la souhaiter parce que Eric Zemmour, un pion dans l’histoire de France, à l’ombre des vrais chefs pour lesquels nous pourrions mourir, a une utilité historique. Même l’insecte le plus détesté de la Création – le moustique – a une utilité écologique. Même Sarkozy, c’est dire, a eu une utilité historique : remettre le mot « identité » dans l’arène.
L’écologie du Berberus Zemmourus est de redonner une fierté à ces Français complexés qui n’avaient personne pour les représenter, un espace social où faire vivre leurs idées. Ce n’est rien en termes matériels, mais si l’on parle psychologie des foules, c’est énorme. Ce n’est pas avec des maximes de stoïcien dépressif qu’on fera sortir les Français de leur léthargie. Leur donner un porte-parole, même s’il n’est pas une réincarnation de Poilu (mais où le trouverait-on de nos jours ?), est un palliatif nécessaire à la santé mentale de notre peuple.
Malgré toute l’aversion qu’on doit avoir pour le cirque électoral, il ne faut pas mésestimer l’importance morale de ces petites satisfactions. L’autre utilité historique de Zemmour est de pousser la droite à l’audace et à la réflexion sur son identité. Trump a joué le même rôle chez les Républicains. En défiant le politiquement correct, les populistes montrent que le franc-parler est souvent plus payant que la chiraquisation du discours.
Enfin, on retiendra qu’un intellectuel juif français a défendu le rôle de Pétain dans le sauvetage des Juifs sous l’Occupation. A-t-on mesuré l’importance historique de cette séquence médiatique, lorsque l’on sait à quel point notre monde vétuste et sans joie est le fruit direct de la victoire américano-soviétique de 1945, triomphe du grand capital et du totalitarisme anti-chrétien ? Zemmour ne sera peut-être qu’une comète dans le paysage politique, mais il aura apporté un peu de salubrité intellectuelle.
Julien Langella
Retrouvez tous les samedis, dans le Quotidien Présent, les réflexions inspirées par l’actualité à Julien Langella, cofondateur de Génération identitaire et membre d’Academia Christiana.
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