On voit fleurir les références aux soutiens de Eric Zemmour, financiers chez JP Morgan ou Rothschild. Eric Zemmour n’est pas un homme issu de la droite radicale, aucune chemise bleue phalangiste dans sa garde-robe. Le Berbère francisé est un nostalgique du RPR vieille école, un gaulliste conservateur.
D’autre part, comme journaliste rôdé à la fréquentation des hommes qui comptent, Zemmour n’a aucun dégoût pour les puissants. Bien intégré dans le système, disposant d’amis importants et d’admirateurs influents, il sait où chercher l’argent. Et en attendant l’émergence d’une avant-garde de milliardaires catholiques traditionnalistes connaissant l’épopée vendéenne sur le bout des doigts, improbables Chouans du CAC 40, Zemmour va chercher l’argent où il se trouve. Chez des banquiers. Quel scoop…
De là à dire que c’est un jouet du « grand capital », il y a un grand pas de mauvaise foi. Mussolini était à la fois soutenu par des socialistes convertis au patriotisme et par la haute-bourgeoisie libérale, le IIIe Reich a reçu l’aide de Ford, des nationalistes irlandais l’ont été par les Allemands et même les Mérovingiens, fondateurs de la France chrétienne, avaient un argentier fort peu catholique dans leurs tiroirs. Chilpéric, l’un des petits-fils de Clovis, « collectionnait les objets d’art [et] un juif nommé Priscus était son rabatteur », écrit Georges Bordonove dans Clovis, paru en 1988, premier tome de sa longue saga Les rois qui ont fait la France.
Le fait que des volontaires de l’armée ukrainienne, dans la guerre contre l’invasion russe depuis 2004, aient des armes américaines entre les mains ne les transforme pas automatiquement en supplétifs de l’US Army. Les rebelles anti-jacobins toulonnais de 1793 n’étaient guère plus des agents de l’étranger parce qu’ils ont cru trouver dans l’intervention anglo-espagnole une porte de sortie à la Terreur. Et la Ligue au seizième siècle, autour du duc de Guise, n’était pas le bras armé de l’Espagne dans le royaume de France.
La politique est une chose complexe, l’histoire est pleine d’imprévus et le « Qui paye décide » mis à toutes les sauces ne constitue pas un argument décisif pour grimer Zemmour en Juif Süss. Ni, d’ailleurs, pour valider n’importe quelle opinion. Tout homme d’envergure marche sur une corde raide, montre un visage séduisant aux uns et aux autres, sait recueillir le soutien qui lui manque… N’importe quel enfant qui a déjà joué au Monopoly peut le comprendre.
La politique est un métier de charmeur de serpent et le débat mérite d’être placé un peu plus haut qu’au niveau d’une mauvaise parodie de journalisme d’investigation. Les anti-Zemmour primaires ont un biais cognitif : pour eux, c’est un agent du Mossad. Pour le prouver, ils sont prêts à remplir des colonnes entières avec des extraits de Libération, de L’Express, titres de presse tout à fait honorables comme chacun sait, pour prouver les connexions entre Zemmour et la caste mondialiste. La démocratie n’existant pas, les élections n’étant qu’une plateforme d’idées, c’est sur ce terrain que le débat doit se situer. A la fin, il n’y a que les idées qui comptent, car elles seules survivent aux tempêtes qui perdent les hommes.
Julien Langella
Retrouvez tous les samedis, dans le Quotidien Présent, les réflexions inspirées par l’actualité à Julien Langella, cofondateur de Génération identitaire et membre d’Academia Christiana.
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