« Portefeuille numérique », « monnaie 2.0 », « billet digital » : le vocabulaire récemment utilisé dans certains titres de presse nous prépare psychologiquement à la grande transition vers la dématérialisation des flux monétaires. Le Covid-19 n’aura été que le marchepied d’une tendance plus ancienne. A Londres, depuis plusieurs années, la dynamique est bien engagée puisqu’un nombre croissant de restaurants, d’hôtels et même d’artistes de rue, n’acceptent que des paiements par carte bancaire.
Qu’on ne s’y trompe pas : ce n’est pas un débat technique, le choix d’une société sans cash n’est pas neutre politiquement, c’est un choix de civilisation. L’absence d’espèces convient aux sociétés nomades et aux Etats tyranniques qui assurent un contrôle total sur leur territoire : à l’instar des pays despotiques orientaux dont les territoires sont très unifiés et contrôlés par le cheikharabe ou le Khan mongol, contrairement aux pays européens morcelés par la féodalité sous l’arbitrage souple du roi. Ce contrôle de la terre par le pouvoir central limitait fortement l’indépendance par la richesse immobilière et privilégiait donc la richesse mobilière : l’or, les bijoux, la soie, les épices...
Autrefois en Europe, l’homme libre – qu’il soit grec, romain ou sujet du roi de France – était propriétaire d’un domaine garantissant son autonomie et celle de ses « gens », reconnaissable à sa forteresse et à son blason. Bien sûr, il y a toujours eu des marchands mais leurs richesses dépendaient du pouvoir des seigneurs et du roi qui les tolérait chez eux. Aujourd’hui, l’homme « libre » s’identifie au porteur d’actions nomade et sans attache, déraciné et promoteur du déracinement universel. En résumé, souligne Guillaume Travers,
« traditionnellement, en Europe, on était libre parce que l’on était d’une terre ; aujourd’hui, on est “libre” parce que l’on est de nulle part »
(Eléments, avril-mai 2019).
Cela ne signifie pas que l’Etat-nation devient de plus en plus faible. Au contraire, la dématérialisation est un signe fort de son évolution totalitaire. Comme nos gouvernements sont surendettés, aucun flux ne doit leur échapper. Or, sans espèces, la perception de nouveaux impôts devient un jeu d’enfant.
De plus, grâce aux paiements numérisés, l’Etat pourra connaître l’identité de tous les clients d’une librairie politiquement incorrecte ou d’un bar associatif et compiler une quantité d’infor- mations hors normes sur ses citoyens. La SWIFT, société gérant la majeure partie des infrastructures de paiements dans le monde, partage ses données, même pour les paiements réalisés en Europe, avec le gouvernement américain.
Ainsi, nous assistons à l’émergence d’un Etat mondial régi par des instances supranationales dont les nations ne sont que les relais. Le territoire de cet Etat obèse couvre la planète, les règles deviennent mondiales et uniques, le droit s’uniformise et se privatise.
L’époque actuelle n’est qu’une étape, un temps de mutation vers Le Meilleur des mondes, roman décrivant la soumission des peuples par des plaisirs artificiels, la jouissance sexuelle et le contrôle des naissances. Comme on le voit, tout est déjà en place.
Retrouvez tous les samedis, dans le Quotidien Présent, les réflexions inspirées par l’actualité à Julien Langella, cofondateur de Génération identitaire et membre d’Academia Christiana.
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