Interrompue par le confinement, la rediffusion du film Plogoff, des pierres contre des fusils, sorti en 1960, se poursuit. Le documentaire montre la lutte des habitants de ce village de la côte de granit rose, à la pointe du Finistère, contre l’installation d’une centrale atomique.
Quoi que l’on pense du combat anti-nucléaire, les résistances au pot de fer de la bureaucratie, victorieuses ou non, sont riches de leçons à l’ère de la tyrannie techno-sanitaire.
Plogoff : quatorze croix et calvaires, cinq chapelles, une église paroissiale, une « Ecole du Bout du Monde » et, à l’époque, 2100 habitants. En 1980, qui sont les habitants de Plogoff ? Des marins militaires et marchands, des paysans, des pêcheurs, des retraités et des femmes au foyer de la classe moyenne. Leur écosystème ? Un rivage pur, sanctuarisé, la mer à perte de vue et la liberté pour cadre naturel. EDF arrive avec son projet de centrale et quelques gourmandises dans les poches : des emplois, des terrains rachetés rubis sur l’ongle, des aires de jeux et une piscine… Rien que ça. Cela porte un nom : le développement.
Mais les Gaulois réfractaires, stimulés par leurs Bonemine, Agecanonix et autres Iélosubmarine, préfèrent la simplicité au PIB : « Nous, on a la mer, les couchers de soleil, la beauté. » En 1970, un centre commercial construit sur la Pointe du Raz, accusé de dénaturer l’endroit, fut détruit. « En 1980, il n’y a que des autochtones, témoigne Nicole le Garrec. Des gens qui sont là depuis des générations, qui se connaissent et ont un attachement viscéral à leur terre (…) Les militants 68ards se croyaient libres (…) Mais la liberté dont fait preuve les habitants, c’est autre chose. (…) Ils n’étaient pas rebelles. Ils n’avaient jamais participé à des manifestations. » Mais un RG avertit la préfecture : « vous vous casserez les dents ».
Le 29 février, onze personnes dont un mineur sont arrêtées et détenues dans un ancien séminaire du bourg voisin. Devant la mairie, Amélie Kerloc’h s’empare du micro et scande le mot d’ordre : « Faites de Plogoff une île ». Les le Garrec hypothèquent leur maison pour tourner leur film, sont logés sur place dans une famille, leurs voisins amènent la petite à l’école et vivent ces événements avec passion : « une vieille femme de plus de 80 ans dit qu’elle se bat pour que ceux qui vont venir après puissent encore vivre sur leur terre ».
Les habitants de Plogoff affrontent la légion, revenue du Liban et appelée à Plogoff pour faire respecter la loi du fric. Les femmes du village disent vouloir combattre « jusqu’à la mort ». Pourquoi ont-ils gagné ? « Ils se sont libérés véritablement. Ils ont jeté par-dessus bord leurs façons de penser (…) Le respect de l’autorité, de l’Etat. Qui leur mentait, les méprisait.
Il ne leur restait plus que la mer, leur terre, leur culture. Leur vie et celle de leurs enfants. C’est cela qu’ils mettaient en jeu. Comment pouvaient-ils reculer ? »
Le 9 juin 1981, Mitterrand annule le projet. Créer des villages gaulois, sauvegarder farouchement notre homogénéité, se préparer à tous les sacrifices futurs par une fraternité radicale : une recette que les marcheurs de LMPT et autres déçus doivent méditer.
Julien Langella
Retrouvez tous les samedis, dans le Quotidien Présent, les réflexions inspirées par l’actualité à Julien Langella, cofondateur de Génération identitaire et membre d’Academia Christiana.
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