« Solutions locales pour un désordre global » est un complément du documentaire « Sous les pavés la terre », qui nous montre de véritables alternatives dans le domaine du durable en éco-construction, et en nouvelles pratiques agricoles avec l’agroforesterie. Ce documentaire avant-gardiste sorti en 2010 et réalisé par Coline Serreau regarde l’aberration de l’agriculture industrielle et interroge les innovateurs de l’agroécologie qui militent pour le retour d’une agriculture paysanne de courte échelle, locale et familiale, qui pourra sur le long terme aider à faire émerger un nouveau paradigme qui remplacera cette (hyper)modernité. Car, ici c’est la remise en question du libre-échange et son mythe du marché parfait transparent et sans état, fait d’oligopoles imposant les prix et nous faisant croire au maintien de la paix, qu’il faut déconstruire. C’est en effet le contraire qui se produit par la guerre des ressources, un effondrement des minima sociaux, augmenter les profits en réduisant les coûts salariaux, étouffer les revendications sociales par le chantage de la délocalisation à une main d’œuvre d’ouvriers-esclaves des pays du sud et le maintien « à tout prix » de l’efficacité commerciale au détriment des questions sociales, sanitaires, écologiques, culturelles et politiques. Hélas, c’est ainsi que la mondialisation fonctionne. La « dérégulation », la « compétition » et la « délocalisation » sont insoutenables et doivent être remplacées par la « régulation », la « coopération » et la « relocalisation » nous explique Patrick Viveret.

Par conséquent, ce sont des systèmes « agrosylvopastoraux » qui maintiennent une civilisation agricole sobre, conviviale et résiliente et sont de véritables solutions locales pour sortir des famines et des chocs. Encore faut-il sortir de la vision économiste et techno-scientiste de l’agriculture monoculturelle qui produit juste des kits de production pour des multinationales incitant à mieux guider et maîtriser la nature, qui en déracinant les plantes déracine de surcroît les hommes. Par ailleurs, la dépendance malsaine des « pays du sud » aux pays dits du « septentrion » par un endettement massif favorisant la monoculture dans ces pays est dramatique et ruine les petits agriculteurs, favorisant les migrations. En outre, dans les pays dit du « Sud » l’équilibre agricole est maintenu par des systèmes agraires et polyculturelles qui ne dépendent pas de l’exportation internationale et des spéculations sur les matières premières à des prix très fluctuants, soumis au bon vouloir des pays politiquement et économiquement dominants et c’est ce que nous démontre en l’occurrence Vandana Shiva et Pierre Rabhi. Ce dernier à une certaine époque soutenait la résistance de Thomas Sankara au Burkina Faso face à ce rouleau compresseur mondialiste.
« Les paysans ont longtemps nourri leur communauté locale et nationale. Le capitalisme, notamment dans sa forme néolibérale, œuvre pour les jeter à la poubelle de l’histoire et les remplacer par une monoculture à forte intensité en capital, essentiellement tournée vers un supermarché mondiale de consommateurs de l’élite sociale et des classes moyennes urbaines. Pour atteindre son objectif de transformation complète du système mondial de production et de distribution alimentaires, l’agro-industrie avance, entre autres, la justification suivante de l’éviction des petits exploitants : ils sont incapables de nourrir le monde. En fait, les paysans n’ont pas l’ambition de nourrir le monde : leurs horizons se limitent à fournir des denrées à leur communauté locale et nationale. C’est parce qu’ils assurent du mieux qu’ils peuvent la subsistance de leurs communautés respectives que l’on peut dire des paysans de partout qu’ils nourrissent le monde. »
de Walden Bello dans la fabrique de la famine.
Les paysans face à la mondialisation, éditions carnets nord, 2012 ; citation tiré de la revue Limite n°12, p.82.