Mercredi 20 décembre, le dessin animé hollywoodien Ferdinand sort dans les salles de cinéma. L'histoire est simple, voire simpliste : Ferdinand, un taureau « au grand coeur », « victime de son imposante apparence », est capturé pour être envoyé dans un élevage d'animaux de combat destinés à la corrida. Avec son amie Nina, il tentera de regagner sa liberté.
La bande annonce nous montre de méchants matadors, symbole d'une société oppressive et intolérante, un animal hors-norme mais attachant et sa jeune amie humaine. Comme très souvent, dans les dessins animés américains, le fil rouge de l'oeuvre est le thème de « l'émancipation » à l'égard de traditions archaïques et liberticides. C'était déjà l'idée du film Rebelle, sorti en 2012, mettant en scène une princesse fan de tir à l'arc et refusant de se marier. Le taureau Ferdinand, par son physique extraordinaire et « l'incompréhension » qu'il suscite, est évidemment l'image de la minorité LGBT ou immigrée soit-disant discriminée par une société masculine et brutale. De plus, l'arrière-plan philosophique inconscient du film nous renvoie à Jean-Jacques Rousseau, pour lequel la nature était pure et sans tâches jusqu'à ce qu'elle soit corrompue par la société. Cet idéalisme malsain est lancinant dans l'opinion publique occidentale, il fait toujours primer les sentiments sur la raison et on voit ce misérabilisme à l'oeuvre dans tous les domaines.
Même si on peut trouver un éloge des racines dans l'histoire d'un taureau qui veut retrouver sa terre, ceci est un prétexte pour attaquer violemment la tradition de la corrida, figure emblématique de l'identité européenne, surtout espagnole, provençale et languedocienne. On voit bien qu'il s'agit de débiter les clichés habituels présents dans la conscience collective WASP américaine à l'égard de ces Européens arriérés et barbares. Bien sûr, cette image est surtout véhiculée chez les bobos de la côte ouest, plutôt que chez les américains, les vrais, de l'intérieur. Mais une nation fondée par des puritains protestants rêvant d'une « nouvelle Terre promise », rebelles à toute autorité lorsqu'ils étaient en Europe, ne pouvait générer qu'un rejet culturel profond des coutumes ancestrales de l'ancien monde.
Quoi que l'on pense de la corrida, qu'il ne s'agit pas nécessairement de défendre en tant que telle, il faut prendre conscience que l'industrie américaine du loisir vampirise les consciences et diffuse des valeurs radicalement contraires à la préservation de notre identité. Autrefois, les enfants apprenaient des contes et légendes issus des tréfonds de la mémoire populaire, reflets et véhicules d'un certain mode de vie ; les hommes et les femmes chantaient, dansaient, et mangeaient différemment d'une région à une autre, selon une diversité d'arts de vivre originaux. Maintenant, ils se nourrissent, sur le plan intellectuel, artistique, moral et alimentaire, de ce que Hollywood, Monsanto, Amazon et Coca-Cola déversent dans leur quotidien. On ne peut décemment pas être catholique, c'est-à-dire tourné vers le beau, le vrai et le bien, ainsi qu'identitaire, et entretenir ce système à tuer les peuples par notre consommation. Plutôt que de subir la propagande hollywoodienne, renouons le fil d'Ariane en partant à la reconquête de nos mythes, contes et légendes.